Quelle misère que les tristes locaux dans lesquels le termite du secteur tertiaire se voit contraint d'enfermer son corps et aliéner son esprit! Dans un décor de plastiques vilains et gris, et sous les bombardements fébriles des lumières au néon, se rendre à son travail ressemble à une hospitalisation.

Alors qu'accablé par une malédiction SQL, et dans l'angoisse d'une embuscade téléphonique, on a attiré mon attention sur la laideur institutionnelle des documents administratifs.

La Compagnie devrait allouer, disait-on, un certain budget au fonctionnement d'une entité dédiée à la mise en valeur des tableaux, compte-rendus et histogrammes qui agravent les réunions par leur esthétique technocratique.

Une vigoureuse équipe de créatifs serait donc chargée dans la joie, d'enluminer les productions tabulaires, et d'épargner à des tablées de collaborateurs, l'affliction des matinées de slides rébarbatifs.

Les réunions prendraient alors une tournure stimulante:

Plutôt que d'être assénés par un retro-projecteur, les documents seraient apportés sous verre, par des huissiers, pour être livrés à l'admiration critique des invités. On peut aussi imaginer les disposer sur les murs pour permettre aux collaborateurs de les découvrir en flânant, pendant que seraient servis par des extras raffinés, une débauche de coktails et de canapés.

En fin de réunion, un commissaire priseur organiserait de fiévreuses enchères sur certains des livrables les plus appréciés, tandis qu'aux sous-sols de la Compagnie, une armée de gobelins enchaînés, s'affairerait dans la sueur et le bruit, à imprimer sur toile ou sur bois, des rapports trimestriels en caractères gothiques, et des kilomètres d'histogrammes sur tapisserie.

Ah, et il faudrait louer un orchestre...